Les matériaux oubliés de la bioéconomie - Le CLUB des Bioéconomistes
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Les matériaux oubliés de la bioéconomie

Des anciens compagnons de l’humanité !

Le CLUB / 2019

A l’évidence, il n’y a pas que la construction pour illustrer les défis que doivent relever les biomatériaux. Depuis la nuit des temps, les textiles et les cuirs, par exemple, oeuvrent eux aussi discrètement dans les stratégies de l’histoire, tout comme le caoutchouc d’ailleurs, cet auxilliaire extraordinaire de la révolution automobile. Aussi anciens soient-ils, ces biomatériaux restent pourtant toujours présents dans notre quotidien. Ils sont utiles et distingués, efficaces, et à la source d’économies industrielles innovantes et reconnues, jusque dans les filières du luxe… On les cite rarement, « bioéconomiquement parlant »… et pourtant… :

                       * Les premières corporations d’ateliers travaillant les peaux sont apparues en Europe au Moyen Age, avec la différenciation entre les tanneurs (utilisateurs d’écorces de chêne ou “écorces à tan”), et les mégissiers (utilisateurs d’un mélange à base de cendres végétales appelé “mégis”). Les métiers du cuir prirent ainsi, historiquement, une importance considérable. Le travail du cuir constituait d’ailleurs en France, au début du XIXe siècle, la troisième source d’activité industrielle derrière la métallurgie et le textile. On dénombrait à l’époque 1500 tanneries-mégisseries sur tout notre territoire. Il ne subsiste dans notre pays que 19 tanneries et 31 mégisseries, avec 1500 emplois répartis dans les principales « régions du cuir » ( l’est de la France, le centre et le sud ouest). Car aujourd’hui, près de 76% des peaux françaises sont malheureusement exportées à l’état brut… Là encore, donc, comme dans la filière bois, la France peine à rendre sa valeur ajoutée compétitive et à en capter les bénéfices sur notre propre territoire !

                       * Les textiles … Ne parlons pas ici du coton, du chanvre ou du lin… ni des laines diverses, traditionnelles, qui accompagnèrent et accompagneront partout l’histoire humaine dans ses innombrables besoins, de l’habillement jusqu’aux voiles de bateaux… et aux linceuls ! Car là encore, malgré la toute puissance des textiles synthétiques, le “naturel”, le “biosourcé”, résistent et se “re-développent” même ! Qui connait ainsi dans le détail, par exemple, la belle histoire, d’origine française, de la viscose (ou rayonne, d’origine cellulosique, appelée aussi soie artificielle), laquelle constitue toujours un débouché majeur pour la filière bois-fibres ? Et qui a conscience, aussi, des fonctionnalités et des applications extraordinaires des “non-tissés” cellulosiques, qui s’imposent sur de nouveaux marchés à haute valeur, comme le médical ou l’automobile par exemple ?

                       *D’utilisation universelle enfin, le caoutchouc est quant à lui un matériau souple et élastique issu du latex, secrétion naturelle de l’hévéa. Il est connu depuis la découverte de l’Amérique du sud au XVe siècle, mais ce n’est qu’en 1823 que Charles Mcintosh, puis Charles Goodyear, en maîtrisèrent toutes les véritables applications industrielles (dont les pneus…), en particulier grâce à la vulcanisation. Ce fut, avec la mise au point du celluloïd, la première aventure industrielle « bioéconomique ». Oui, les premières matières plastiques commerciales furent biosourcées … Et aujourd’hui encore, le caoutchouc naturel résiste et innove. Il se partage toujours les grands marchés mondiaux (22 Mt /an) à égalité avec le caoutchouc de synthèse.

Et si nous en revenions pour terminer à la construction, nous devrions bien nous rappeler que le béton armé (ciment mêlé de granulés et armé d’acier…) n’a qu’à peine plus de 100 ans d’existence et de références en tant que matériau de construction certifié.

Le bois, lui, les charpentes, les torchis, les pisés ou les colombages ont presque 10 fois plus recul dans l’histoire !… et ils résistent toujours, impassibles et séduisants, comme de véritables joyaux architecturaux, si modernes pourtant, ornant nos plus belles villes historiques.

Mais qu’en sera-t-il donc au fait, dans dix siècles, de nos structures actuelles en béton armé, de leur résistance et de leur vieillissement ? Les alertes ne manquent pas…