26 Oct COP 21 et le pari « bas carbone » de la bioéconomie
Quelques vérités bien utiles !
Le CLUB / 2015
Si l’on convertit simplement en « équivalent CO2 » les données actuelles et futures de production qui caractérisent les biofilières françaises, on approche les impacts et les bilans « carbone » des filières du bois énergie et du biogaz, des biocarburants, des bio-matériaux et de la chimie biosourcée (en y incluant les effets de substitution de GES et de stockage de carbone). Ainsi…
- La filière bois énergie (biogaz compris) substitue actuellement 9 Mtep / an nets d’hydrocarbures en évitant l’émission annuelle d’environ 35 M tonnes de CO2 (1 tep # 4 tCO2). Nous pouvons envisager, à l’échéance 2030, une perspective réaliste de substitution accrue d’hydrocarbures de 13 ou 14 Mtep / an au maximum, soit # 55 Mt CO2 dont l’émission serait évitée annuellement à cet horizon !
- Les biocarburants (2,3 Mtep bruts en énergie finale pour 1,2 Mha de cultures dédiées en 2012) consomment en énergie, pour assurer leur propre production « du champ à la roue », moins de la moitié de leur propre contenu énergétique (< 1 Mtep). Le rendement énergétique global de leur filière est donc de 200 % à 300 % selon les productions. (Nb. Ce même rendement n’est que de 80 % pour les carburants fossiles…). La filière biocarburants substitue donc de fait, actuellement, et en valeur nette # 1,5 Mtep / an d’hydrocarbures en évitant l’émission annuelle d’environ 6 M tonnes de CO2 (1 tep # 4 tCO2). En doublant l’objectif de production de biocarburants à l’horizon 2030, (y compris avec la future G2), une perspective probable de substitution d’hydrocarbures se dessine, pouvant aller jusqu’à l’équivalent annuel de 12 Mt CO2 évitées pour 4 à 5 Mtep brutes produites annuellement.
- La filière bois-fibres matériaux transforme en France 35 Mm3/an de bois français (récolte forestière annuelle de bois d’œuvre : 22 Mm3, et de trituration : 13 Mm3), auxquels s’ajoutent environ 10 Mm3 / an de bois-fibres importés. Les rendements matière des process de transformation de cette filière sont de l’ordre de 50 %, ce qui peut permettre d’évaluer à 25 Mm3/an environ les volumes annuels de produits finaux en bois-fibres qui sont effectivement mis en oeuvre chaque année dans notre pays (charpentes, construction, agencements, emballages, cartons, outils, etc.).
Sachant que 1 m3 de bois équivaut à une tonne de CO2, c’est un stock additionnel brut de # + 25 MtCO2 qui se trouve immobilisé chaque année, pour des durées variables (de 5 à 50 ans et plus), dans les produits du bois (mais n’oublions pas que ce sur-stock est aussi compensé plus ou moins partiellement par du déstockage de démolition). L’effet de substitution et de stockage-carbone de ces produits-bois peut être très variable. A fonctionnalité égale, le remplacement du béton par du bois diviserait la consommation énergétique nécessaire à la production par neuf. Pour de l’acier remplacé par du bois, le facteur de division est de 17 (source : FCBA/CNDB-2009). On peut avancer (à titre d’hypothèse) que l’économie d’émissions par substitution peut atteindre alors, en moyenne, 1,5 tCO2 par m3 de bois mis en oeuvre, soit, ici, environ 35 à 40 MtCO2/an. L’objectif 2030 pourrait raisonnablement viser à augmenter de 150 % la production de la filière, ce qui conduirait à :
– une augmentation proportionnelle du stockage de CO2 dans les produits bois (en passant de # 25 MtCO2/an aujourd’hui à # 35 MtCO2/an vers 2030),
– une augmentation également proportionnelle de l’effet de substitution des émissions de GES (en passant de # 35 MtCO2 aujourd’hui à # 50 MtCO2 /an vers 2030).
- La filière chimie du végétal, composites et fibres occupe en agriculture, à la production, 600 000 ha environ de grandes cultures variées (amylacées, textiles, oléagineux, betteraves, etc.), pour aboutir à des productions de matières premières utiles et valorisables de 1 à 1,5 Mt/an et pour déboucher à l’aval sur 7 % à 10 % de parts de marché en approvisionnement dans les principaux secteurs de la chimie, de la cosmétique, des polymères et des composites (plan chimie du végétal de 2007). Il en résulte une réduction nette moyenne d’émissions par substitution de l’ordre de 5 tCO2 par hectare, ou encore, actuellement, une réduction d’émissions de GES totale de 2 MtCO2/an. L’’objectif 2030 qu’avait prévu le plan chimie du végétal était de multiplier par trois ces productions en 20 ans vu le dynamisme remarquable de ces filières. Nous pourrions alors compter en principe, vers 2030, sur une substitution suffisamment efficace pour réduire les émissions de GES de 6 MtCO2/an environ.
On mesure la puissance de « l’amortisseur climatique » qui est du aux biofilières et à la bioéconomie. Et cette attractivité est renforcée encore par la capacité de ces filières à créer de l’emploi, à innover et à conforter notre indépendance énergétique. La place des biofilières est donc légitime et évidente parmi les leviers d’action les plus performants et les plus massifs dont nous disposons contre le risque climatique. Et il faut retenir, pour terminer, que la compétitivité des produits et des énergies bio-sourcés dont on parle est celle de produits RENOUVELABLES (qui financent donc le coût de leur propre renouvellement…). On ne doit donc pas s’égarer en mesurant simplement cette compétitivité par comparaison avec les performances de produits ou d’énergies conventionnels… Car ces produits sont, eux, ÉPUISABLES, NON RENOUVELABLES, et qui plus est BIEN PLUS ÉMISSIFS de GES… et car ils ne rémunèrent aucunement le coût collectif de l’épuisement de leurs gisements !
Ne comparons donc que des choses comparables…